mercredi 26 mars 2014

432 - le médaillon - 8 - l'index - 5








Pour un plan d'ensemble de l'ouvrage, voir ici.













L'index - 5


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Histoire de ma disparition

Le deuil est une histoire d'amour sans lendemain

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Chapitre 4


Je ne m'allongeais plus sur le lino de l'appartement de type 1 bis.

La nuit faisait de moi un autre.

J'étais amoureux.

Ne pas me remplir de moi-même. 

Cet autre que je devenais.

Je le désirais en périphérie.

Qu'au centre trône la nuit.

Mon amour.

Je décidai de perdre mon temps.

Me tenir aussi loin que possible des motifs du monde. 

Préserver un espace vide. 

Répondre aux exigences de ma conscience neuve d'homme ébranlé.

Etre fidèle à ma pratique de la vérité:

Que je devienne un autre à chaque instant. 

La vérité n'est pas quelque chose que l'on constate.

La vérité est une altération de soi au jour le jour.

Dès lors que je pris cette décision de perdre mon temps je vécus heureux.

Je disparaissais au fur et à mesure que se manifestait l'autre que je devenais.

Cet effacement me ravissait.

Ce constant renouvellement de la personne devenue un passage m'inclinait à la joie la plus profonde.

Chaque matin je m'asseyais contre un mur de l'appartement de type 1 bis. 

Je m'efforçais de ne rien faire de particulier. 

Je travaillais à mortifier cet esprit selon lequel les hommes et les choses sont utiles.

Je me tenais à disposition de la nuit. 

J'avais appris dans la souffrance qu'elle était plus moi que jamais je ne pourrais l'être. 

Je vivais à découvert.

Concentré sur l'objet fuyant de ma quête.

Je m'abandonnais à l'effacement de ma personne.

C'était grisant.

Le souffle qui tour à tour lève et délaisse nos poumons avait une teneur considérable en immensité nocturne.

Son épaisseur abyssale creusait ma présence. 

J'étais respiré.

J'étais vécu.

J'étais un moyen sans fin. 

Une gratuité.

Un bon plaisir.

Du corps s'épanchait un temps en suaves ruissellements de précipice.

La lumière déversait à flots denses les dons de l'abîme.

Je n'avais rien à perdre.

J'étais la perte même.

En apparence je n'étais pas occupé.

A la vérité je travaillais comme un forcené.

Je butais sur ce paradoxe que ma volonté cherchant à n'être rien donnait une consistance positive à ce rien:

Elle en faisait quelque chose.

Elle en faisait un but.

Je devais témoigner d'une grande volonté pour m'effacer.

Ma personnalité se trouvait renforcée dans cet effort si bien que l'entreprise se révélait de plus en plus ardue. 

Il n'était pas rare que je m'épuise.

Me décourage et m'effondre.

Je m'endormais épuisé à même le sol.

Je m'enfonçais au fil des heures et des jours dans un état somnambulique.

L'absence d'une ma mère m'envahissait.

J'en devenais le véhicule.

Une souffrance fulgurait.

Déchirait la conscience.

Une ma mère manquait.

J'étais triste et sans volonté.

Qu'avais-je espéré?

Vivre au nom de la nuit?

J'étais une plaie consacrée à une ma mère.

Comment se pourrait-il que toute une vie j'en vienne à la nuit?

Dans le corps une angoisse nouvelle apparaissait.

Je faisais l'expérience que j'étais au monde et que je pouvais tout aussi bien ne plus l'être.

Cela m'était déjà arrivé d'une certaine façon à la mort d'une ma mère. 

Mais aujourd'hui je tenais à moi-même.

La nuit commençait à m'effrayer.

A force de disparaître j'étais maintenant une personne.











le médaillon - 8 - l'index - 5 - Avril 2014

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