dimanche 25 janvier 2015

499 - E (9,E) - troisième version (mise en espace)

































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Soit un repère orthonormé. Soient assignés à l’axe des abscisses les huit chiffres de la date de ce jour précis où la mort de ma mère n'a pas eu lieu dans ma vie. Soient les quatre lettres de l'acronyme assignées à l’axe des ordonnées. Soit un système de coordonnées dans lequel le territoire du vide se trouve momentanément lié, ligoté, relié à un ordre arbitraire, tel Isaac ligaturé par son père Abraham sur l’autel du sacrifice. Soient les balises référencées dans ce repère, accolées à une lettre et un chiffre. Soient les balises groupées dans un ensemble de trente-deux éléments. Soit l'alphabet polonais, l'alphabet du pays des Plaines, comprenant justement trente-deux lettres, pour nommer les trente-deux balises. Soient trente-deux entrées dans le vide de ma mémoire. Soit un cryptogramme possible que le vieux me tatoue sur l’avant-bras dans le rêve.  

Amorce de la balise: Suffoquer dans une chambre à gaz – Etre sidéré dans la chambre des parents à la maison – Ressentir une gêne indescriptible devant le vieux




M.E.R.E, balise E (1,M), deuxième version, 01/2015












samedi 24 janvier 2015

498 - E (9,E) - deuxième version











E (9,E)


j'ai été: dans la chambre des parents. à la fenêtre / j'ai vu: un ciel blanche. el'h'ans'ch. je n'ai plus eu: ma peau / deboutdevant l'armoire. R. j'ai vu: on s'est rué (tous) / vers la porte| d'une auTre chambre. on a hurlé / j'ai vu: des pieds sur moi. je suis / tomb-é __. j'ai été / avec _ de la nuit dans les yeux. j'ai vu: j|e crois du meurtre. M. j'ai été / devant le vieux. 1. et je me suis / tu. il m'a regardé / avec _ de la nuit dans les yeux. j|e crois que _ j'ai été gêné / deboutdevant ses yeux. je n'ai pas su _ dire j|e crois. 9. j'ai vu: un ciel blanche. el'h'ans'ch. je n'ai pas / compris. personne n'a dit / dans la chambre des parents. j|e crois que _ ma peau a été / un ciel blanche. el'h'ans'ch. 6. j'ai été / avec _ de la nuit dans les yeux. j'ai vu: j|e crois du meurtre. E. les y-eux du vi-eux m'ont tué. je me suis / tu. 4. j'ai senti: ma p e a u trouée dans ses yeux de nuit. non. quelqu'un a dit, laissez-moi sortir. quelqu'un a dit, je veux vivre. non. 1. j'ai pleuré ma p e a u dans le blanche. eu'h'ans'ch. je n'ai pas été / grand je n'ai pas été grand / je n'ai pas été / grand. j'ai vu: j|e crois du meurtre. j'ai été / avec _ de la nuit dans les yeux. non. 9. le vieux / n'a rien dit. j'ai vu: ma p e a u trouée dans ses yeux blanches. eu'h'ans'ch. j|e crois _ je n'ai rien dit. j|e crois _ j'ai eu peur. j'ai eu envie / pleurer / j|e crois. je n'ai pas dit. 0. non. E. j'ai été / dans le meurtre blanche. eur'h'ans'ch. ma p e a u trouée / vers des yeux ga|zés. 0. non






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Soit un repère orthonormé. Soient assignés à l’axe des abscisses les huit chiffres de la date de ce jour précis où la mort de ma mère n'a pas eu lieu dans ma vie. Soient les quatre lettres de l'acronyme assignées à l’axe des ordonnées. Soit un système de coordonnées dans lequel le territoire du vide se trouve momentanément lié, ligoté, relié à un ordre arbitraire, tel Isaac ligaturé par son père Abraham sur l’autel du sacrifice. Soient les balises référencées dans ce repère, accolées à une lettre et un chiffre. Soient les balises groupées dans un ensemble de trente-deux éléments. Soit l'alphabet polonais, l'alphabet du pays des Plaines, comprenant justement trente-deux lettres, pour nommer les trente-deux balises. Soient trente-deux entrées dans le vide de ma mémoire. Soit un cryptogramme possible que le vieux me tatoue sur l’avant-bras dans le rêve.  

Amorce de la balise: Suffoquer dans une chambre à gaz – Etre sidéré dans la chambre des parents à la maison – Ressentir une gêne indescriptible devant le vieux




M.E.R.E, balise E (1,M), deuxième version, 01/2015











mercredi 21 janvier 2015

497 - J (1,M) - deuxième version














J (1,M)



des cheveux blanches ' , _ ont chuté sur un ciment. je n'ai rien dit / dans une peur. 0. un homme _ a pleuré. on m'a tondu / moi aussi. nous aussi: cheveux bruns 'heveux blanches '''eux blonds. 1. j'ai trouvé: une perruque / dans la chambre. M. j'ai touché: ces cheveux de personne / dans l'armoire. en'lahr'moir. E. j'ai vu: le vieux. dans l'arrière boutique / j'ai regardé: le vieux me regarder. 9. j'ai regardé: les 'heveux / au bas de son crâne dégarni. 0. les '''veux ont bougé / ma mort est passée je l'ai vue / dans sa nuque. R. non. des cheveux blanches d'un homme / en larmes / ont chuté sur un ciment. chiale-pas, quelqu'un a dit. des 'heveux ont neigé ' , _. non. j'ai vu: ces '''veux de personne / dans l'armoire. en'lahr'moir. j'ai entendu: crier je crois. ces cheveux de personne. 4. j'ai eu: peur. la mort est passée / à travers le vieux. ses 'heveux qui bougeaient / "comme dans l'eau". 6. il n'a rien dit. je crois que _ j'ai tremblé. il m'a tendu: la soupe miso. je n'ai pas su _ quoi faire. non. E. putain mais ta gueule, quelqu'un a dit. arrête de chialer, quelqu'un a dit. mais un homme a pleuré'pleuré'pleuré. j'ai vu: pleurer un homme au dessus de ses '''veux blanches ' , _. une: n'ai-je la mort. je n'ai pas su _ quoi dire / dans une peur. des 'heveux de personne / ont fait la mort / dans l'armoire. en'lahr'moir. j'ai senti _ que j'ai pris feu / dans les cris de personne. neige senti : j'ai brûlé. 9. non. le vieux m'a regardé / depuis la mort _ qui est passée. ça m'a fait pleurer / moi aussi. 1. non. j'ai touché: nôtre crâne rasé. ces '''veux de personne aussi dans l'armoire. en'lahr'moir. non. n'ai-je de cheveux / sans plus personne / sur un ciment froid / des larmes ont passé ' , _ dans l'autre chambre.












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Soit un repère orthonormé. Soient assignés à l’axe des abscisses les huit chiffres de la date de ce jour précis où la mort de ma mère n'a pas eu lieu dans ma vie. Soient les quatre lettres de l'acronyme assignées à l’axe des ordonnées. Soit un système de coordonnées dans lequel le territoire du vide se trouve momentanément lié, ligoté, relié à un ordre arbitraire, tel Isaac ligaturé par son père Abraham sur l’autel du sacrifice. Soient les balises référencées dans ce repère, accolées à une lettre et un chiffre. Soient les balises groupées dans un ensemble de trente-deux éléments. Soit l'alphabet polonais, l'alphabet du pays des Plaines, comprenant justement trente-deux lettres, pour nommer les trente-deux balises. Soient trente-deux entrées dans le vide de ma mémoire. Soit un cryptogramme possible que le vieux me tatoue sur l’avant-bras dans le rêve.  

Structure d'une balise : Les Camps - Le non-événement - Le rêve de New-York

Amorce de la balise J :  Voir par terre les cheveux blancs d’un vieux à la tonte – toucher la perruque de maman dans l’armoire à linge – considérer les cheveux blancs du vieux




M.E.R.E, Les balises, J (1,M), deuxième version,  janvier 2015










jeudi 15 janvier 2015

496 - LIVRE-AVRIL - 16 bis - PROVISOIRE







16





    mon sang se tait      




nous avons désossé notre fatigue / nous en avons brisé les os / et nous avons écrit les poèmes avec la moelle de notre harassement / d’avril jusqu’au bleu de la mare nostrum / jusqu’au Gibraltar nous avons jeté nos forces / et nous avons lu les livres / et nous avons été les livres / et nos livres ont hurlé la mort et ils ont hurlé la vie / et nous avons jeté les poèmes du camp dans la bouche des migrants / et les migrants ont été des Guinée / et ils ont été des Syrie / et ils ont été des Maroc / et ils ont été des Afghanistan / et ils ont été des Erythrée / et ils ont été des Palestine de Gaza / et ils ont été des Soudan / et ils ont été des Egypte / et ils ont été des Somalie / et ils ont été des Mali / et ils ont été des Niger / et ils ont été des Burkina Faso / et ils ont été des Ghana / et ils ont été des Togo / et ils ont été des Bénin / et ils ont été des Nigeria / et ils ont été des Côte d’Ivoire / et ils ont été des Mauritanie / et ils ont été des Centrafrique / et ils ont été des Gabon / et ils ont été des République démocratique du Congo / et ils ont reçu les poèmes hurlants de l’Europe et de l’entre les langues de l’Europe / les migrants ont hurlé en retour / de leurs embarcations de fortune ils ont hurlé en retour / ils ont hurlé qu’ils portaient la blessure / ils ont hurlé qu’ils avaient la lumière de la blessure avec eux / et les migrants ont été le poème / et le poème est monté jusqu’à nous / et nous n’étions ni de la vie ni de la mort / et nous étions du camp / et nous avions le camp pour seul corps / et Gibraltar a été constellé des corps du poème / et Gibraltar a été constellé de blessures et d’espoirs / et nous avons été refoulés par les hommes du FRONTEX / et nous avons vu les migrants se faire arraisonner / et dans la bouche d’avril nous sommes revenus



                                la mort
    et son pouls      –      joie      




je suis passé. 
je me retourne : se laisse apercevoir, seule, une vibration informe d’où s’essorent de temps à autre des souvenances en attente d’un texte. 
au cours duquel prendre corps avec les faits.
dans la frontière, qui n'a pas d'au-delà, qui est le monde en soi, est instruite une généalogie du sperme.
par sperme il faudrait entendre que ce père meut, ou bien que ce pair meut, ou bien que se perdre meut, ou bien que sperme. mais cela reste indéterminable. 
et la frontière se révèle une grande plaine sinistre et glaciale des hivers polonais.
je découvre avec stupeur que c’est là précisément que la plupart d’entre nous, y compris les plus vivants, vivent jour après jour. 
et si je me retourne à nouveau, j’envisage des bribes pauvres et sexuelles d’une histoire qui n’en est plus une, loin de tout oubli, loin de tout prétexte, parce que personne n’aurait rien vécu depuis longtemps. 
il faut comprendre peut-être que la plaine aujourd’hui, cet hiver incessant, cette frontière d’une profondeur sans limites, reste un espace dans lequel aucun visage ne saurait plus advenir, y compris au terme d’une relation amoureuse. 
et si l’on se penche, on trouve sans peine ces fragments du journal de physiologie et de pathologie générale et, parfois, les feuillets d’un traité de basedow abandonné. on entend que l’auteur aurait eu la folle ambition, un temps, de briser le corps malade de la frontière pour qu’advienne un territoire des visages. 
avant d’être lui-même brisé, 
comme il en va de toute déferlante.



    ton épaule menue      moindre
    lisière _ écartelée      



intoxication. 
variation du ph et la réserve alcaline au cours des —s par l’eau et par la guanidine (wodon et ledrut), 185. / 
action de la composition du régime sur l’— chronique par le fluor chez le rat (phillips et hart), 150. / 
rôle préventifs des agents méthémoglobinisants dans l’— par les fluorures (korasnik, rochkow et wincgradowa), 322. / 
poésie par — des sommaires rébarbatifs (lachrima et bilieux), 253. / 
la méthode de rosenthal pour le traitement de l’— mercurielle aiguë (hug, llacer et ruiz), 323. / 
modifications hématologiques déterminées par l’— barbiturique (carratala) 362. / 
volume sanguin au cours de l’— expérimentale par le b.coli (harmon et harkins), 362. / 
ô les médecins morts par — errent et s’enquiquinent dans la table analytique des matières ! (boutonnier), 476. / 
étude comparative et expérimentale du pouvoir antidote des substances méthémoglobinisantes au cours de l’— par le cyanure de potassium (buzzo et carratala), 363. / 
maladie de basedow après — par l’oxyde de carbone (raab), 363. / 
teneur en plomb dans l’os dans l’— saturnine expérimentale (kasahara et shin-ichi-nasu), 645. / 
vieilles graphies pour réguler l’— par réel assourdissant (lige et thale), 657. / 
le formaldéhyde sulfoxylate de soude dans l’— mercurielle aiguë expérimentale (brown et kolmer), 645. / 
étude par la méthode histospectographique de la fixation du manganèse dans l’— chronique expérimentale par le bioxyde de manganèse (policard), 661. / 
les polythionates de potassium comme antidote dans l’— cyanidrique (chistoni et foresti), 1012. /


      pour loger ce précipice à l’endroit 
    nôtre




d'un hiver à venir les épreuves et les doutes mais aussi ce qu'il en est de soi après les épreuves et les doutes quand on se sent moins fort mais aussi plus apte à exister vers les infinies complexités du delta vers les sagesses de l'estuaire cette nuit encore la fatigue me tient éloigné du repos je cherche l'oubli sans pour autant sombrer dans l'inconscience alors je m'use comme un galet dans le rire de l'eau je m'altère dans la moue nocturne c'est une occupation dénuée de sens j'aime à m'y plonger quand j'en ressens la nécessité cela ressemble à un suicide il me paraît de la plus haute importance d'apprendre maintenant à m'ennuyer à l'écart de soi cheminer à mes côtés tourner autour de soi faire les cents pas à proximité de ma propre conscience obséder mon existence à la manière d'un souvenir diffus impalpable intense me hanter avec des motifs incertains vides politiques d'une beauté sans pareille d'une poésie pas même vieille d'une heure voilà je crois une modalité de la révolte aujourd'hui c'est un secret qu'il faut trahir aux heures tardives de la solitude

















LIVRE-AVRIL - 16 bis, janvier 2015

mardi 13 janvier 2015

495 - Z(6,E), deuxième version






           




Z(6,E)

                                                                                                     

                                                                                                   
                                                                                                  
                                                                                                    
on a mis des morts / au monte-charge cinq hommes six femmes et quatre enfants. un monte-charge a monté des morts : aux fours. on / amis des morts / au monte-charge sept hommes trois femmes et quatre enfants. un monte-charge a monté des mrts : aux fours. on a mis des mrts / au monte-charge cinq hommes six femmes et quatre enfants. un monte-charge a monté des mrts : aux fours. non. M. j’ai serré mes doigts avec les doigts / dans le hall je me suis tenu / deboutdevant. 1. les fleurs ont fané. je crois qu’ _ une l u m i è r e a fait un bruit blanche. un bruit de lait mrte. j’ai vu : le reflet de lait / sur le bois de l’aconsole. j’ai vu : le reflet se br
                                        iser contre un sol. je crois que _  j’ai senti : des doigts se tenir / lesunslesautres : au bout de m/o(i. R. j’ai vu : lesmurslescyprès sur l’écran du vieux. 9. j’ai vu : un endroit. non. E. je me suis mis _ sur des mrts au monte-charge. j’ai vu : lescyprèslesmurs / dans un jour. 0. je crois qu’ _ empilé dans les mrts / j’ai trouvé : une place. qu’est-ce tu fous, quelqu’un a dit. dégage tu vas nous faire tuer, quelqu’un a dit. j’ai vu : des doigts mrts / au bout de m/o(i. non. 9. des mains ont saisi _ le reflet de lait mrte / dans un jour. 4. des mains l’ont porté / à la lèvre. non. E. j’ai bu : un reflet de lait mrtelescyprèslesmurs / ont été / dans un jour. 1. un monte-charge a monté des mrts : aux fours. 0. non. 6. deux huit et quatre                                                                                    
                                                                                           
                                                                                            
                                                                                            
                                                                                          mrts








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Soit un repère orthonormé. Soient assignés à l’axe des abscisses les huit chiffres de la date de ce jour précis où la mort de ma mère n'a pas eu lieu dans ma vie. Soient les quatre lettres de l'acronyme assignées à l’axe des ordonnées. Soit un système de coordonnées dans lequel le territoire du vide se trouve momentanément lié, ligoté, relié à un ordre arbitraire, tel Isaac ligaturé par son père Abraham sur l’autel du sacrifice. Soient les balises référencées dans ce repère, accolées à une lettre et un chiffre. Soient les balises groupées dans un ensemble de trente-deux éléments. Soit l'alphabet polonais, l'alphabet du pays des Plaines, comprenant justement trente-deux lettres, pour nommer les trente-deux balises. Soient trente-deux entrées dans le vide de ma mémoire. Soit un cryptogramme possible que le vieux me tatoue sur l’avant-bras dans le rêve.  

Structure d'une balise : Les Camps - Le non-événement - Le rêve de New-York


Amorce de la balise V (6,E) : Empiler les cadavres sur le monte-charge – serrer mes doigts avec mes doigts dans le hall – considérer attentivement les murs et les cyprès sur la photo










Z (6,E), deuxième version, Les Balises, M.E.R.E,  Mars 2014

jeudi 8 janvier 2015

494 - peut(-)être un journal






Aujourd'hui je vous la présente, depuis la personne-de-l'écriture et de nulle part ailleurs : 


          Maladie de Basedow 


        hyperthyroïdie, tachycardie, fatigue importante, perte de poids, exophtalmie (rare : pas mon cas), nausée, tremblement, sueur, nervosité, sensation de soif







La maladie de Basedow est une maladie auto-immune, due à un mécanisme d'auto-agression de l'individu contre sa propre glande thyroïde.



J'ai fréquemment évoqué la maladie dans LIVRE-AVRIL; et voilà que je suis vraiment malade. J'ai cette croyance selon laquelle c'est au fil des textes commis par le biais de ma main que la maladie m'a choisi. 
Peu à peu le texte m'a pénétré: il s'est substitué à mes organes. 
Cette transmutation a commencé il y a plus d'un an, on en trouve des traces déjà dans mon journal du 15 septembre 2013, une empreinte très nette dans celui du 8 juillet 2014; elle est clairement énoncée dans le brouillon du fragment 11 du livre-avril: 


"nos organes sont vraiment des textes, ils sont des textes pour de vrai et c’est par le truchement de ces textes que nous pourrons, à défaut de toute autre médiation, capter quelque chose de ce qui a lieu dans l’écart qui préside à la relation de soi à soi."


C'est la violence et la nécessité de ma foi dans cette assertion :
mes organes sont des textes 
qui m'ont livré à la maladie, à basedow. 
     basedow est le fils unique de mes organes-textes, 
     basedow est la frontière,
     basedow est la manifestation de la transmutation.

Et, enfin, me voilà malade, prêt à lutter contre l'ange basedow, à être à mon tour cette frontière que j'invective et recherche de toutes mes forces en écrivant LIVRE-AVRIL

Le thème de LIVRE-AVRIL est en effet le passage, et le lieu du passage, c'est-à-dire la frontière. Ce sujet, je l'ai choisi en considération de ce que je traverse actuellement en psychanalyse : je veux dire ce moment où parler sur le divan devient insupportable parce que celui qu'on est, il se trouve qu'on ne l'est plus, et celui qu'on sera, on ne l'est pas encore. Dans cet intermède la consistance de soi peine à se faire sentir. Un certain dégoût, voire déconsidération, survient à l'encontre. 
Je peine et je cherche à contracter ce devenir que je suis ; mais bien enraciné dans une histoire dérisoire et singulière qui est la mienne, je garde confiance.

L'intuition du LIVRE-AVRIL, que je n'ai pas du tout préméditée, c'est que la maladie est l'état nécessaire pour être et penser la frontière. Cette intuition est mortelle, je m'en rends compte maintenant. Mais c'est trop tard. Je suis malade. Ma thyroïde s'est transformé en texte, les anticorps ne la reconnaissent plus et l'attaquent. 

La maladie peut-être va écrire par le moyen de ma présence au monde et de mon appétit désormais modéré de disparition (je parle de m'absenter de ma vie et de celle des autres). Elle va dénoncer la frontière, la révéler pour que j'en sois moi-même un territoire et contracte, dans le meilleur des cas, un devenir qui ne soit pas du semblant.

(Mais aujourd'hui je ne tête plus l'écriture. Je suis sevré et peux vivre sans écrire. C'est à dire qu'écrire aujourd'hui est plus nécessaire que jamais car aucun besoin ne m'y pousse. Ecrire ne répond à rien, est comme une pure question, et cette question se saisirait de l'épaisseur de mon corps pour advenir et prendre expression.) 

Or aujourd'hui je suis atteint d'une maladie auto-immune. Je comprends que la maladie assume un conflit psychique. J'y vois cette frontière qui m'obsède. La frontière serait liée au conflit. Comme un axiome : nulle frontière qui soit en paix.

Frontière, lieu de conflit, d'instabilité, de risque et de grandes potentialités : lieu de création.

La maladie est un lieu de création, un temps dédié à l'expression de l'inouïe singulier que recèle tout visage. 

Il m'apparaît avec évidence que maladie de Basedow est une réponse à RêvedeNewYork. RêvedeNewYork serait donc une question, ce que je n'avais pas saisi jusqu'alors. Je déduis que MaladiedeBasedow me visite à la manière d'un songe, de la même manière que RêvedeNewYork. Sauf qu'en ce cas, ce n'est pas la pointe psychique de ma présence qui est visitée, c'est mon corps. Ce qui est une excellente nouvelle car je cours après celui-ci depuis mon enfance. Or si les agents de la scène obscure, de l'autre scène, commencent à interpeller mon corps, c'est sans doute que celui-ci a acquis suffisamment d'autorité pour qu'on fasse appel à lui. Ainsi, je n'aurais qu'à suivre la voie ouverte par les travailleurs de l'ombre.  

En quoi MaladiedeBasedow répondrait-elle à RêvedeNewYork? J'imagine qu'il s'agit d'un cri. Celui du nouveau-né, celui de l'humain que l'on torture, celui de la colère. Il s'agit de cris, au pluriel donc. J'imagine que MaladiedeBasedow est une somme de cris de différentes natures. J'imagine que ces cris sont des réponses possibles à cet emmerdement merveilleux que constitue ce fait improbable d'être en vie. Alors je crois que RêvedeNewYork pose la question de vivre. Et Ma mère est lamentable, et les balises, sont autant de dispositifs visant à mettre en forme cette question de vivre dans notre contexte qui est celui de l'Holocauste comme culture, de la psychopathologie du langage, de l'impossible pensée de la négativité et par suite du déni de la mort. 

J'en déduis que, derrière ce cri, qui est une expression de l'impuissance, se trouve une parole impossible à dire, se trouve un élément que je ne peux pas représenter directement par le moyen du langage, un élément qui serait une réponse probante à la question de RêvedeNewYork. MaladiedeBasedow intervient ici en tant que médiation, entre la question et mes réponses, je veux dire ce travail d'écriture qui est toujours une réponse à la sommation démente de ma présence au monde, comme quoi il me faudrait vivre, vivre, vivre! 
A défaut de puiser directement à la source, j'extirpe mes formes scripturaires depuis MaladiedeBasedow. Depuis cette frontière nommée maladie. 




*

si tu n'es pas blessé
tu n'as rien faire ici

mais sache que tout 
homme est blessé

donc si tu n'es pas blessé
c'est que tu ne te connais pas

si tu ne te connais pas
tu n'as rien à faire ici

mais sache que nul 
homme ne se connaît

donc si tu te connais
c'est que tu ne te connais pas

si tu te connais 
tu n'as rien à faire ici


*

J'écris ces mots à propos de basedow bien après ceux qui précèdent, auxquels je ne comprends plus grand chose désormais. Il y a une forme de nostalgie âcre doucement, que je ressens dans les ressorts de mon affection. Je ne sais pas à vrai dire ce que basedow peut signifier parce que cette signification se présente à moi dans une complexité si dense que je ne saurais pas en faire une synthèse. Il en va néanmoins, cela je peux l'affirmer autant avec le cerveau qu'avec le ventre, d'un conflit qui m'implique moi-même et moi, si j'ose dire. Nul doute que cette guerre qui me ravage, et que la maladie assume là où je n'arrive pas à dire, se trouve lié avec mon fantasme et mon désir les plus fondamentaux, c'est-à-dire avec le coeur nu du récit que je suis. C'est pourquoi sans doute me vient la nécessité aujourd'hui d'écrire de la littérature. (Je pense à Sebald, à cette hypnose du style qui déporte le lecteur dans une expérience hors du temps et de l'espace : dans une mélancolie sans nom que recèlerait l'Europe en son for le plus intérieur.) Besoin d'épaisseur, de phrases lentes, longues, rythmées selon un régime de monotonie qui soit à même de provoquer cet ennui qui signale les textes où s'attarder. La littérature est ennuyeuse, je le crois, c'est sa principale qualité, sa force la plus sidérante : un ennui qui emporte notre adhésion et nous édifie hors du régime habituel de la causalité. Alors il me reste à écrire. Je vais créer un petit blog basedow pour cela. Et il me reste surtout à me soigner. 
Et finir le LIVRE-AVRIL. 
Et terminer les Balises.

***