mardi 18 juin 2013

359 - peut(-)être un journal







Si je considère mon écriture du point de vue de ma difficulté d'expression. Et si je considère ma difficulté d'expression en terme anal. Il est aisé de comparer l'écriture des balises à une colique et celle du Voyage à Mazamet à une diarrhée. D'un côté, extrême retenue, rigidité de la forme, contraintes plurielles qui engoncent l'expression; de l'autre, laisser aller, pas de contrainte, et des mots des mots des mots. D'un côté, le silence (anus fermé), de l'autre le cri (anus ouvert). 
La quête, ce serait que l'orifice s'exprime dans une scansion harmonieuse ouvert/fermé, laisser aller/retenue, qu'il trouve une demi-mesure entre le silence et le cri: ce qu'à l'ordinaire on appelle parler

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Ecrire une série sur le chanteur de hard-core. Sur l'expérience scénique, ses rituels, ses naufrages, ses beautés : son intensité radicale. Et puis ses paradoxes dont le premier peut se formuler de la sorte : être comme seul au monde devant ceux qui regardent. Oh, quelle jouissance narcissique, d'être comme seul au monde devant des gens venus te voir! 

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C'est comme ça: quand je partage un lien, je me permets plus de commentaires sur Twitter que sur Facebook. Par exemple, pour ce texte: dans le temps de l'autre de @christogrossi, j'ai accompagné le lien de ces mots sur Twitter : beau texte, on y est dans les choses de la vie. Sur Facebook, j'ai simplement écrit : beau texte. Avant de publier, je me suis demandé si j'en disais plus. J'ai hésité un moment. Je n'ai pas pu. Cela m'a paru impudique. C'aurait été trop en faire. 
J'ai observé bien souvent mes scrupules sur Facebook.  Sans doute sont-ils liés au fait que je m'y sens plus surveillé qu'ailleurs, que je me sens exposé plus que je ne voudrais. 

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Quelque chose me chiffonne. Est-ce viable que chaque humain sur terre ait un ordinateur portable, une tablette et un smartphone?

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Comme les choses vont, il faut se préparer à mourir au combat ou sous les coups des brutes.  Il est temps désormais de se faire à cette idée que l'avenir proche sera violent. Nous ne mourrons pas délabrés, séniles et couverts de pisse dans un lit d'hôpital. La liberté commandera nos sacrifices. Et nous lutterons. Et dès à présent les camps se dessinent  nettement, entre ceux qui voudront lutter et ceux qui acquiesceront au musellement de leur voix. Gare à qui tu t'adresses. Choisis tes amis. 
Si je me trompe, hé bien, ce sera un heureuse surprise. Je préfère me fourvoyer que prendre le risque de vivre comme un bovin. 
C'est sans doute cela, être père.  

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J'aime cette chanson parce qu'elle a longtemps hanté mes souvenirs d'enfance sans que je puisse l'identifier. 

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"Il est difficile aux personnes qui n'ont jamais navigué de se faire une idée des sentiments qu'on éprouve, lorsque du bord d'un vaisseau on n'aperçoit de toutes parts que la face sérieuse de l'abîme. Il y a dans la vie périlleuse du marin une indépendance qui tient de l'absence de la terre; on laisse sur le rivage les passions des hommes; entre le monde que l'on quitte et celui que l'on cherche, on n'a pour amour et pour patrie que l'élément sur lequel on est porté: plus de devoirs à remplir, plus de visites à rendre, plus de journaux, plus de politique."

Chateaubriand, Mémoires d'outre-tombe, Livre sixième - Chapitre 2, Le livre de poche


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"L'homme en pente.

La maladresse de dire je
de savoir si...

Une fois pour toutes, le défi est d'en
arracher la première page, de la 
mêler au livre, quelque part dans le
hasard.

Chaque fois il faut extraire les mots
de là où ils sont. Puis les mettre en
langue.

Et peut-être alors, quelquefois..."

Thierry Metz, 40., L'homme qui penche, Pleine page éditeur


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Lacis de cris sur feuille de brume

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