mercredi 16 mai 2012

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Jérôme Burau, allongé sur le divan: - Hier, je suis resté éveillé tard dans la nuit. Je n'ai rien fait de particulier. Disons que j'ai rôdé dans mon appartement. J'ai essayé de me coucher à de multiples reprises. Mais je me suis chaque fois relevé au bout de quelques minutes. J'ai grignoté un peu de pain à la cuisine. Je me suis rendu au salon. J'ai regardé mon reflet sur l'écran de la télévision en veille. J'ai écouté les bruits de chaise chez les voisins en début de soirée et puis leur silence. Il y avait la sirène des pompiers ou des policiers de temps à autre, des klaxons... J'ai erré comme ça jusque tard. Je me suis trouvé pitoyable. Cela m'a fait sourire un instant parce que j'ai l'habitude de me sentir minable. Quand je me suis mis à genoux sans trop savoir pourquoi, il m'a semblé que j'avais touché le fond. Seul, insomniaque, sans projet, sans joie... Je me suis allongé dans le couloir. J'ai fixé un moment le plafond...
Silence...
- J'ai eu le pressentiment que quelque chose se passait dans la rue en bas... Que je devais y aller. Comme si j'avais un rendez-vous. J'ai pris cela au sérieux. Je suis sorti. Il n'y avait rien. Seulement une voiture de temps en temps. La lumière des réverbères. Un peu de vent dans les arbres...
Silence...
- Je suis remonté chez moi, j'ai allumé la télévision, je me suis recroquevillé sous la table de la cuisine. J'ai pleuré. Je me suis balancé d'avant en arrière en pleurant. Je n'étais pas mal comme ça. Cette activité avait quelque chose de cosmique, en dehors de l'humanité... cela m'a soulagé... C'est cela peut-être qui me pèse: être un homme. Je crois que je serais mieux en lierre, en caillou... dans l'empire des végétaux ou des matières inertes... un brin de la terre, un bout de bois qui flotte sur le canal...


Julien Boutonnier 

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