vendredi 9 mars 2012

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07h25
Les voitures se suivent sur les voies de circulation. Aux feux rouges elles tremblent imperceptiblement, comme malades, fiévreuses, obstinées. Des piétons enroulés dans de longues écharpes foulent les trottoirs sans y penser, tels des lambeaux de rêves s'évaporant. Sous les platanes effeuillés dort l'eau du canal constellée de divers objets de consommation courante. Quelques joggeurs ridicules sur les chemins de halage. De minuscules flaques dans les anfractuosités et sur les bas-côtés se souviennent qu'il a plu hier; elles regardent le ciel en silence, vibrent parfois au passage des vents, se souviennent peut-être qu'elles furent un jour pure chute, innocence de l'ondée; et bien qu'elles reflètent chacune sur leur peau de chagrin les innombrables kilomètres d'atmosphère de leur matrice, peu s'en étonnent. Pas même Clarisse qui ce matin encore va contraindre son corps magnifique et amoureux pour une tâche sans grâce, dans un bâtiment sans agrément, en échange d'un salaire déshonorant. 
     
Julien Boutonnier

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