mardi 13 février 2018

685 - peut(-)être un journal






Je me tiens là, dans ce vif d'un instant, à la façon d'une fin d'après-midi, quand s'en revenir au visage sien semble cette si parfaite mascarade qu'il demeure plus à propos de laisser tomber toute prétention à être soi-même.

les roseaux 
ont compris cela, 
les roseaux 
ont commis l'irréparable il y longtemps, 
les roseaux 
ont défait le sens, ils en sont restés au bon vouloir du vent.


pourquoi pas - à vrai dire - ? - 

le bon vouloir du vent



Pour le livre numérique M.E.R.E, j'ai fait des lignes. Comme un enfant puni, comme un enfant puni et créatif. J'ai fait des lignes parce que je suis coupable oui. Je suis créatif parce que je suis coupable. (A tous les idiots qui souhaitent guérir les gens de leur culpabilité, je dis qu'ils feraient mieux de s'abstenir, la culpabilité est ce trésor de la personne sans lequel nul visage n'est plus possible). 

faire des lignes, c'est me situer dans le droit fil de mon ventre. 
dans l'axe de la raison splanchnique.
dans le logos des tripes auquel seul je reconnais une autorité.

faire des lignes, c'est tricoter de la bordure là où manque un lieu.
là où manque un lieu, c'est mon ventre.
mon ventre est la mémoire géographique d'un événement qui n'adviendra pas.
cet événement, c'est celui de ma libération.
ma libération, c'est la méduse.
la méduse, c'est l'ombilic de ma phobie.

sans phobie: rien.






La phobie a pour objet l'incarnation. Je ne peux tolérer ce fait d'être incorporé (dès lors, quel est ce ventre mien dont je me réclame?). D'où mon obsession de disparaître. Ci-contre, il s'agit de cela, disparaître, dans une acmé morbide, avec une mère. il me semble que mourir enfant, en nu-pieds et chaussettes rouges, aurait eu de l'allure. Le drame, ici, consiste en ceci que rien ne permet d'affirmer que ce fils et une mère ne sont pas en train d'apparaître.

L'indécidabilité 

de l'image me torture. Ecrire est une entreprise visant à prolonger cette torture le plus loin possible, dans les confins du trouble.  Dans les confins du trouble, l'identité enfin se dilacère sur des mots aussi signifiants que creux, aussi vains que nécessaires. Advient le report somptueux des ressorts de l'existence, à d'autres, à d'autres, et la vacance désolée sur laquelle règne un astre 

indécidable.









j’ai vu des morts des barbelésr-h’’’é
je les ai vus debout contre une clôture. 
j’ai vu des morts attendre dans un froid. 
 ils sont moins morts que nous, quelqu’un a dit. 
  




De cette haine toujours indécise dans son orientation, prête à se diriger vers l'extérieur ou à se retourner contre le sujet lui-même et par là souvent proche du crime, l'oeuvre vraie garde toujours la marque, même dans ses aspects les plus volontairement réconciliés. A cet égard, l'histoire littéraire pourrait vraiment reprendre à son compte le mot de Freud dans une lettre à Pfister: " On ne peut rien faire de vrai sans être un brin criminel."
Michel de M'Uzan, Aperçus sur le processus de la création littéraire







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Achat possible en librairie à partir du 28 mars en donnant l'ISBN.

1 commentaire:

Dominique Hasselmann a dit…

Entonnoir des lettres comme autant d'êtres humains aspirés par l'abîme historique...........................................................................................................................................................