dimanche 8 mai 2016

644 - peut(-)être un journal







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J'écoute du punk.

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 C'est une question
     de révolte et de patience:

     la longue révolte d'une existence qui ne renonce pas à se défaire pour qu'autre chose advienne.

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Francis Royo est mort. 

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Isabelle est née.

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Imre Kertèsz est mort.

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Il y a les visages de mes camarades dans le métro anonyme. il y a des regards qui se donnent au travers du vague. Des choses qu'on ne saurait dire. Il y a ta présence en forme de creux, puis en forme de plein, il y a ce clignotement que tu es: cette déflagration érotique. A cette source le désir trouve de quoi converger vers une substance, aussi subtile ou ramassée soit-elle. Il y a des bouts de phrase aussi, qui fabriquent de l'humain au fur et à mesure. Et ces bouts de phrase sont la génération même. Ils sont la matrice et le tombeau. Il y a enfin, peut-être, des silences qui ponctuent et s'essaiment, jusqu'à s'agglutiner sous les significations: jusqu'à fonder le meurtre: l'acte de foi.

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C'est curieux / comme ces écrivains que je n'ai jamais rencontrées me manquent dès lors qu'ils sont annoncés morts. Je les aime. Et pourtant leurs textes restent. La mort ligature l'œuvre. Et dès lors l'ouvre à d'autres forces vives.

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Je me souviens des photos d'hôpital de Francis Royo. Ces moments d'attente qu'ils partageait sur les réseaux sociaux. Ces couloirs vers la mort sont les nôtres un jour.
Tous les couloirs, à vrai dire, sont vers la mort; question de style, de tempo, question de dates...

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Je me souviens de sa série "Arrache-corps".

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parABole
parCDole
parEFole
parGHole
parIJole
parKLole
parMNole
parOPole
parQRole
parSTole
parUVole
parWXole
parYZole


L'empire des significations possibles recelé dans une parABole.

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Peut-être vais-je pouvoir commencer à écrire quelques mots au sujet des attentats. Quelques mots qui ne soient pas d'une émotion ni d'une idée. Peut-être vais-je pouvoir essayer d'atteindre au témoignage
: au récit.
Rendre compte d'une subjectivité mise au service d'un tel qui y concèderait?
    
     Il y a eu du meurtre.
     Il y a eu de l'image.
     Il y a de l'oubli. 
un nécessaire oubli : comment vivre?
Ou peut-être devrais-je parler de mise à distance?
Ou plus exactement de refoulement?
Des gens ont perdu: la vie / des proches / un bout de soi / la confiance / une intégrité

     La mort des personnes assassinées.
     Reste un enjeu pour chacun.

(relier l'individu et son sujet avec ce collectif limpide, inexistant, des assassinés) 

Le collectif des assassinés.
Que dit son silence?
Que dit-il au collectif des ébranlés dont je suis?
Qui se sent appartenir à la solidarité des ébranlés?
Comment accueillir le collectif des assassinés - ces migrants venus du mort?


Ce qui importe, pour moi, de ma place, n'est pas d'émettre un propos intelligent, une analyse pertinente, non, ce qui importe, pour moi, de ma place, est d'écrire quelque chose qui ait du poids, je veux dire, quelque chose qui soit définitif.

? : du poids

Je fais référence à une vérité qui n'est pas un propos, qui n'est pas un fait que je puisse constater: la vérité à laquelle je me réfère est une altération de soi. Autrement dit, pour être dans le vrai, il m'appartient de m'altérer, de me laisser transformer par l'expérience que je fais du monde.

(Là où le temps est un autre, Anna-Maria Ortese)

Ecrire quelque chose de définitif ne serait donc pas une clôture en ce cas, ce serait une juste expression de l'altération de soi à un moment donné de l'expérience que je suis et dont je suis.
L'instant d'après, à recommencer.

          (Je suis un passage. 
          En héritage.
          Trésor du judaïsme européen.
          Hébreu voudrait dire passage, de passage.

'Être de passage' en héritage.)

L'enjeu reste donc de toucher à une vérité :
exprimer au plus juste l'altération de soi qu'ont suscité les attentats.
Voilà un coeur de l'entreprise.

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Arrache-corps 6

Os d’encoches saturés
sans mémoire souple
simples dans l’aveuglement de leurs éclats
féroces
des lacérations de verrous
pour s’attacher encore
au chemin
mais
ne plus être du pas
entre le sol et moi
chant des marches et des pentes
remplace le pli

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(Il est curieux que je passe du temps à écrire quand la situation exige que je jette toutes mes forces dans le vivre ensemble.
Je pense à une sorte de déficience.
Qui me tiendrait dans le souci de l'action.
Ecrire serait cette action du souci.
Une sorte d'action au second degré, non pas au degré zéro.)

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Il n'est sans doute pas inconvenant de rapprocher les attentats du 6 janvier et du 13 novembre, et la mort d'Imre Kertèsz.
Nous assistons à un passage.
Nous sommes au seuil d'une Europe.
      Meurent les témoins de la guerre totale.
      L'envie de meurtre suscite des vocations, sur ce fond sans doute d'une vie pour de vrai enfin vécue.
      Comme si la vie enfin la vraie pouvait être saisi autrement que dans ce sentiment tragique d'un sable
      coulant entre nos doigts. Qu'est-ce qui permet à une jeune personne de s'établir malgré et dans cette
      perte? Peut-être cela que des pères avant ont su y faire avec cette irrémédiable? Et même à Auschwitz.
      Et même au goulag. Quitte à retourner la tragédie en déchéance d'un être humain réduit aux gestes de sa
      survie. Quitte à construire un sentiment d'être soi dans cette complicité avec les bourreaux, tout
      survivant serait complice.


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Tu te réserves pour l'imprévu. C'est-à-dire que tu n'es pas au centre de ta propre vie.

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Toulouse, le 29/01/16

Cher Camille, Cher Christophe

Voilà, j’ai vu la pièce "Sur une île", au Théâtre Garonne

( "

SUR UNE ILE – théâtre   

« Sur une île » est inspirée des évènements qui ont eu lieu sur l’île d’Utøya en Norvège lorsqu’en juillet 2011, un homme armé, déguisé en policier, a attaqué un camp de jeunes militants du parti travailliste, tuant 69 jeunes activistes et blessant des dizaines d’autres. « Sur une île » est moins une pièce à propos d’Utøya qu’un portrait de l’Europe au début du 21e siècle. Elle met en scène des personnages de fiction – un frère et une sœur – en les mêlant à une réalité documentaire : celle du raid meurtrier d’Anders Behring Breivik. Nous avons travaillé à cette pièce comme à un « mythe noir », où apparait la mécanique de la peur et de l’obéissance qui nous gouverne. En ce sens, « Sur une île » est un écho à la tragédie d’Antigone, un drame où la transgression des règles de la Cité révèle l’ordre tyrannique du roi. « Sur une île » met en scène un frère et une sœur, mais à la différence de la tragédie de Sophocle, c’est ici la sœur qui est morte, tuée dans une guerre dont elle ignorait tout. Cette guerre, désirée par ceux qui comme Breivik se rêvent en petits soldats, est à bien des égards une virtualité de guerre, une virtualité qui produit, qui transforme le réel. Dans « Sur une île », la sœur, Eva, est tuée par un homme qui se présente comme le gardien des « valeurs » européennes dans l’uniforme d’un policier. A la différence d’Antigone, c’est ici le frère ainé qui survit à sa sœur. Il l’attend sur la rive, de l’autre côté du lac et c’est à lui de porter le corps de sa sœur en terre. C’est le sens de cette mort que nous avons voulu explorer. Que nous dit la voix de la sœur morte de l’ordre où nous vivons ? Et que peut le frère accomplir, penser, à partir de cette mort ?


")

J’en suis sorti il y a une heure trente environ. Je tente maintenant de vous livrer mes impressions. J’écris en laissant filer les associations… Je me parle à moi-même… J’espère que vous adhérerez à cette proposition.

Avant que ne commence la représentation, j’ai observé le décor. Et j’ai vu le blanc, au sol, sur l’écran, le grand rideau. Et j’ai vu le bois. Dans un premier temps j’ai pensé à la neige du Nord. J’ai pensé aux maisons de bois. Et puis j’ai eu l’intuition que ce blanc pouvait être une page blanche, un espace de la promesse, d’un avenir peut-être. Quelque chose du vide avec lequel les deux personnages auront à faire.

Alors quand Jonas vomit, peu après le début de la pièce, j’ai vu un acte d’écriture. D’autant qu’il vomit à l'instant précisément où sa sœur parle de la grande place absente du père. C’est très fort ça, cette simultanéité. Jonas laisse une trace sur le blanc comme au nom du père absent, du père qui se dissout dans l’eau, comme il est dit par la suite. Faut-il comprendre que cette absence du père serait matrice de la trace, de ce vomi qui, à vrai dire, est peut-être plus une promesse d’écriture qu’une écriture à proprement parlée. On pourrait d’ailleurs penser que ce vomi est un aveu d’impuissance, un signe ambigu, porteur de possibilités mais aussi absence de perspectives… Mais ce vomi-là n’est-il pas un cri en matière, un cri liquide venu des tripes ? Et l’écriture n’est-elle pas une trame du cri, une tessiture calme de la vocifération ?A moins que cette régurgitation soit simplement un aveu d'impuissance face à l'impossibilité de forger une juste expression de ce qu'il en este de la grande place absente du père?

Dans cet ordre d’idée, j’ai le sentiment qu’Eva répond à Jonas, à son vomissement, avec le sang dont elle se pare, peu avant l'issue de la représentation. C’est en effet la seconde trace qui s’inscrit sur le blanc du plateau, sur ce qui devient peu à peu, me semble-t-il, au fur et à mesure qu’avance la pièce, la neige qui recouvre le meurtre, le blanc qui cache et ouvre d’autres possibles : la page existentielle, la bande passante du temps matérialisé sous les pieds du frère et de la sœur – d’ailleurs, Eva dit à Jonas : sur ces grandes étendues de neige tu écriras notre histoire. Ce sang pourrait être, à l’instar du vomissement, une encre avec laquelle laisser une trace. C’est une expression primaire, brute, dans laquelle on pourrait discerner une dimension sacrificielle peut-être, quelque chose de la création par le corps féminin, où se mêlent mort et naissance. La danse d’Eva, dénudée, sur cette musique orientale, comme une provocation lancée à l’ordre pur, fantasmatiquement pur de tout autre (arabe) souhaité par Breivik, est un beau plaidoyer pour le corps en liberté. J’y vois quelque chose comme un slogan enfin retiré de l’emprise des mots d’ordre. J’ai beaucoup aimé.

Quant au bois, j’y associe le cercueil. J’ai le sentiment que Jonas et Eva sont dans un cercueil vide, vide de père, vide de transmission, vide de paroles substantielles. Et puis je crois que le tapis de course sur lequel s'épuise Jonas est une tombe. Il a la forme d’une tombe.Comme si la mort aujourd'hui n'était plus une butée mais un point fuyant où s'enlise une existence.

Jonas vivant court dans la tombe
pendant qu'attend sa sœur morte.

Quelle image plus tranchante de la mélancolie?

Alors je ne peux pas m’empêcher de penser que Jonas est dans le ventre de la baleine, du monstre biblique des profondeurs, il est dans la mort. Et dans la mort il parle et ce qu’il parle c’est la matière d’un vide qu’aucune parole instituante ne vient mettre en fonction pour diriger le sujet vers la vie, la création, l’amour en somme. Rien du père n’est assez substantiel pour soustraire le sujet à l’emprise du meurtre. La question sur laquelle se clôture la pièce est glaçante en ce sens, et elle me semble confirmer mon intuition. Pour autant que je m’en souvienne, cette question est la suivante : quel meurtre dois-je commettre pour que le monde naisse plutôt que de le voir mourir ? C’est une question de bagnard. C’est une question que pose quelqu’un qui est collé au ventre de la baleine parce que cette question est mise au niveau du meurtre réel qu’a commis le petit soldat Breivik. Il me semble qu’un seul meurtre permet pour tout un chacun de voir naître le monde, c’est celui de ses parents. Et c’est un meurtre symbolique bien entendu. Mais encore faut-il pour cela que les parents aient assez de substance pour recevoir le coup, il y faut de l’épaisseur pour que le geste de l’enfant ne soit pas qu’une déconvenue, qu'une rencontre angoissante avec un réel sans bornes. Et c’est bien cela, je crois, sur quoi Eva et Jonas butent : cette absence de consistance des parents, ce sentiment de Jonas selon lequel ils sont un élément du décor que le père a mis en place comme apparence d'existence. Nous sommes l’hypothèse de notre père, dit Jonas… C’est-à-dire une idée, un présupposé. Ce dont meurent, à tous les niveaux, Eva, Jonas, et Breivik aussi, c’est d’un manque de manque, c'est d'un enfermement dans un semblant qui s'ignore. Et ils ont beau tapé sur les parents, cela ne résoudra rien parce que ce ne sont pas eux les fautifs, il n’y a pas de fautif d’ailleurs. Je ne crois pas. Il y a un moment de l’histoire occidentale où la fabrique humaine est en panne, où la machine instituante et symbolique, on pourrait évoquer l'anthropologie dogmatique chère à Legendre, n’opère plus. Les générations sont transparentes les unes aux autres.

Jonas et Eva sont pris au piège
parce qu’ils cherchent un sens là où il n’y en a pas.
Aucun savoir faire quant à cette butée du sens ne leur a été transmis.

Ce dont ils manquent, ce manque dont ils manquent, c’est-à-dire cette dimension de la mort à laquelle ils ne parviennent pas à articuler leur énergie de vie, c’est d’un tranchant : le tranchant de la Loi entendue comme Loi symbolique séparant un sujet de lui-même, le divisant pour que soit rendu possible le dialogue de soi à soi et de soi aux autres. Et Eva a beau prendre le glaive (j’ai pensé au glaive de la justice), elle ne le manie que pour le pointer sur son frère, comme incapable d’envisager la force transcendante de ce symbole de la Loi. Le tranchant de la Loi, comme je le nomme ici, n’a pas d’assise, il repose sur l’abîme, sur la béance que trouve l’homme quand il cherche à donner sens à sa vie. Au bout des questions, à la source de la cause se trouve un vide. Il y a un savoir faire des civilisations pour escamoter ce vide tout en le rendant opérant. Un ensemble de symbole, de discours, de récits qui font tenir ensemble les corps et la raison d’être. Eva et Jonas manquent de cela, de la Référence, autrement nommé le père symbolique. C’est pourquoi ils sont perdus dans le ventre, dans la matrice, seuls avec cette question terrifiante du meurtre réel comme acte de liberté (comment ne pas penser aux frères Kouachi et aux autres jeunes, si jeunes captifs armés du crime?). En toile de fond s’animent les emprises du scientisme mis au service du marché, de cette arnaque du libéralisme contemporain qui consiste à faire jouer à la science le rôle d’une religion sans pour autant la présenter comme une religion, non, elle est présentée comme une objectivité dont le sujet est évacué…

Jonas parle de trou de la Loi absente, c’est tout à fait ça. Mais la Loi, pour autant qu’elle serait présente, ne comblerait pas le trou. Elle le rendrait simplement intelligible.

Nous perdons
Chaque jour un peu plus
Nous perdons

Quel aveu d’impuissance ! Mais il suffirait de rien pour retourner cela en force car perdre est la condition nécessaire d’une existence. Pour qu’autre chose ait lieu, il faut perdre, pour qu’autre chose advienne, il faut se séparer de soi. La pièce est un constat lucide de cette impossibilité de se séparer de soi pour devenir soi parce qu'aucune parole a pu faire autorité pour accompagner la jeune personne vers un consentement vis-à-vis de cette perte, consentement d'où s'ensuit une libération du sujet et de ses forces de création et d'amour.

J’ai été sensible à la question du travestissement de l’ordre. Que Breivik soit habillé en policier et que les enfants obéissent à l’uniforme du policier sans être en mesure de discerner le meurtre en cours. Que les Etats ne pensent pas et qu’ils répondent au meurtre par le meurtre. Une belle question d’ailleurs : le pouvoir pense-t-il ? La pièce donne à comprendre cette obscure diffusion du mythe, ou plutôt du fantasme de Breivik, dans les appareils d’Etat de l’Europe.

J’ai été sensible aussi à la dimension donnée à l’obéissance des jeunes dans une Europe empêtrée dans un simulacre de paix [les événements derniers tendent heureusement à démontrer qu'une désobéissance est aussi possible cf Nuit debout]. Parce que la paix n’est bien entendue pas l’apaisement après le conflit, ce n’est pas ça la paix, cet ennui mou dans lequel l’humain s’étiole, non, la paix, c’est un équilibre précaire entre des tensions qui nous déchirent, c’est un exercice de la liberté, un désir qui taraude, la paix n’est pas un repos, il y a là un contresens historique, dû sans doute, en partie, aux atrocités du XXème siècle, comme si les sociétés avaient été si éprouvées par les horreurs de la guerre totale qu’elles ne pouvaient plus assumer le conflit, comme si elles ne pouvaient plus l’articuler avec la paix, le bien être, l’amour, alors que le conflit est justement la condition première et nécessaire de la paix, de l’amour… L’obéissance d’ailleurs, pour être substantielle, ne peut qu’avoir été brisée par le sujet, un temps, avant qu’il ne choisisse librement, de lui-même d’éprouver sa liberté dans l’obéissance. C’est la tragédie d’Eva et de Jonas, qui n’ont pas expérimenté cette révolte, ce détour par le chaos, le mal, la perdition, pour prendre acte ensuite de la valeur de l’obéissance et, surtout, de sa relativité en fonction des contextes et des enjeux. Je pense à Patocka, à ses essais hérétiques, par lesquels il montre bien comment l’Europe a évacué la fonction libératrice du conflit, comment elle a confondu un état morbide de stase avec la paix.

Il y a quelque chose qui passe très bien aussi, c’est la fiction de guerre de Breivik dans laquelle meurt Eva. C’est limpide. Et le motif du hameçon marche bien. Cette petite histoire à laquelle font référence le frère et la soeur, où Eva enfant saigne après avoir mis les mains dans les poches du père, comme une parabole de la dissolution de la fonction du père, incapable de ménager une distance avec sa fille (pour apprendre la limite, l’enfant saigne pour de vrai à défaut d’être limité par la parole et l’exemple du père). Petite histoire que l’on retrouve chez Breivik quand il saigne du doigt, se plaignant comme un enfant d’être mis en présence de sa propre douleur alors que, aveuglé par sa fiction de guerre, il vient de provoquer un océan de souffrances.

J’ai reconnu, avec un plaisir certain, l’histoire des chevaux de Malaparte dans Kaputt je crois (ou bien est-ce dans La peau ?). L’eau du lac, dans laquelle périra Eva, est présentée comme ce lieu qui, de possible lieu de salut, de régénération, devient lieu d’emprise de la mort.

Il y aurait encore beaucoup de choses à dire, j’arrête là pourtant : je suis mort de fatigue (et demain il serait pertinent que je tente d’être un père en substance de ma fille et un compagnon en présence de ma compagne !)

Vous comprenez donc que j’ai trouvé votre travail très dense, très juste. J’ai l’impression d’avoir assisté à la représentation d’un théorème qui aurait pris le masque d’un mythe. Quelque chose comme ça. J’y ai trouvé mises en forme nombre d’interrogations qui me taraudent et me hantent.

Portez-vous bien,

Julien

PS: Camille, oui, il nous faut travailler à réintroduire le fond juif européen qui est un socle de notre culture, non pas en terme de nostalgie bien entendu, mais en tant que force instituante pour le présent!

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Reste donc à relier le travail de Legendre et la pensée de Deleuze et Guattari.
Ce n'est pas moi qui le fera.
Faute d'avoir les compétences.
Il y faudra un fou.

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j'ai compris pourquoi je couvre ma page de carnet de ponctuations anarchiques, de traits, de tremblés, de lignes, quand j'écris un poème. C'est quelque chose de diagrammatique... Une armature provisoire, une recherche du rythme...

C’est en tant que lieu de mutations que le diagramme est défini comme « un système physique instable en perpétuel déséquilibre »

Tension vers la condition pré picturale - Deleuze Bacon (reprendre ici )/ 
Tension vers la condition pré lettre ou pré graphème
Développer

exemple



































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La littérature trouble, elle opacifie la vision de soi et du monde, c'est à dire qu'elle prête de la substance.

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La poésie est une recherche de l'ennui et de ce soi qui demeure sans existence propre:
     soi de chaque situation, évasif, perceptible, en acte, fuyant.

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Un sentiment dense d'exister est peut-être au fondement de toute tentative démocratique. Comment défendre l'intérêt de chacun sans ce goût, cette suavité (même étymologie que "savoir") qui accompagne une conscience aiguë de sa propre existence? Je parle bien entendu de valeur. Et de ce travail par lequel rendre à la contingence le fait de ma présence, sans pour autant, toutefois, abdiquer sur l'entreprise du sens, tout relatif, circonstanciel et lacunaire qu'il puisse sembler au regard d'une espérance morbide de clore une fois pour toute cette quête.
Alors cela commence par la séparation. La suavité d'une présence au monde nécessite au moins ce préalable: la séparation. Ce qui nous renvoie à la Loi, celle de la parole, des rites et des formules.

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Cher Anh Mat,
bienvenue à Isabelle, au nouveau père, à la nouvelle mère.


 
(Photo: Anh Mat)

Ciao Francis Royo.
Ciao Imre Kertèsz.
Puisse votre exemple me porter vers. 

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