mardi 5 novembre 2013

394 - GALET - 7








Du lointain de mes doigts rêveurs, Galet nous regarde.





mardi 8 avril 200...
l'amour nous polit - comme rivière galet


16 février 200...

Je regarde les galets s’user sous le flot de l’eau, quelque part au bord d’une attente amoureuse. Je regarde l’eau couler sur un tapis de galets, qui s’use doucement, avec humilité, exactement à l’endroit où je ne sais plus du tout ce que je fais, c’est-à-dire au lieu de l’écriture, où je me tiens sans raison, à l’ombre d’une justesse rare et précieuse, exactement à l’endroit de mon écriture gratuite. 
En même temps que je regarde, je respire. Mal. Un asthme chronique me fait souffrir. Il me contraint à de brèves inspirations. Mais cependant j’aime bien cet asthme parce qu’il me contient, en m’obligeant à mesurer mon souffle. Cette attention portée à la plus naturelle des activités me donne une consistance, une sorte de présence à moi-même. Je vis une relation ambiguë avec ce malaise pulmonaire. Lancinement, respirer me torture et me rassure.
En même temps que je regarde et que je respire, j’attends. J’attends que cela advienne. Je ne sais pas quoi. Cela adviendra. Question de patience. Au jour le jour j’accompagne le temps, ainsi que le ruisseau, et tous deux se frayent un passage dans les prés de mon attente obstinée, au gré des grains, des lignes et du relief de ma vie intérieure. Il y a même une part de mon attente qui attend la plénitude de l’attente. Cette part ne me revient pas, ni à personne. Elle demeure en chacun de nous depuis l’origine, file à travers les générations sans qu’on n’y puisse rien. Aucun refus ne saurait lui être opposé. Toujours elle espère, et désespère en même temps, que mon attente en entier n’ait plus envie de s’épuiser, qu’elle bée dans l’infini afin que, dégagée de tout objet, elle permette une amplitude de réception de la vie qui soit ouverte jusqu’à la sainteté. En attendant, les galets s’usent, ainsi que moi, sous le flot de l’eau des mots, sous ce ruisseau qui serpente à la manière d’une hypnose dont je me défie. 
En même temps que je regarde, que je respire et que j’attends, je serre les dents. Mes dents de lait. Mes dents de l’enfance. Je les compresse à l’intérieur de mon crâne, jusqu’à ce qu’elles suintent et donnent le sperme qu’elles recèlent. Au cœur de la primeur lactée, demeure un sperme silencieux, lointain, dont j’ai besoin pour grandir. Le liquide séminal dégouline par ma bouche, goutte de mon menton, forme une petite flaque sur le sol. Je trempe ma plume dans cet encrier et, à même le ciel, j’écris mon nom pour en dévoiler les secrètes arcanes et croître en vérité.









GALET - 7 - NOV 2013

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