Notes en vue d'un cri
tu es en vie tu marches tu fais des courses tu manges tu conduis tu dis des choses avec la langue et les vibrations de l'air tu vois des films tu choisis des habits le matin et tu regardes dans le miroir ce que ça donne en penchant un peu la tête sur ton épaule droite j'aime bien ce mouvement quand tu penches la tête sur ton épaule droite en tirant sur le bas de ton pull pour qu'il tombe bien tu vas au travail tu es fatiguée tu déambules dans le salon tu cherches tes lunettes je les trouve je te les donne tu lis au lit tu dors tu t'emmitoufles sous la couette rien ne dépasse que tes cheveux flaque blonde dans la nuit tu n'es pas là tu n'es pas là à Mazamet tu me manques mais qu'est-ce que je fais si loin de toi c'est ça que je suis venu chercher ? c'est le manque de toi c'est le manque de la présence de toi que je suis venu chercher ? sous le viol de ma voix toi oui derrière le rêve de New York toi oui dans les méandres aigus des phrases
j'acquiesce à
la perpétuité des
pas
ça résonne
dans une ruelle
kaléidoscopique où
frémissent ailes et barbelés
tu parles de toi tu poses la tête sur mes genoux et tu me dis ta journée tes heures tu me dis tes émotions tes doutes et comment t'as répondu et comment t'as été touchée par les paroles moi ça me prend ça m'épaissit tes mots ça me donne lieu tes mots qui montent vers moi en colonnes de soif et de présence je regarde tes dents luire derrière tes lèvres et je regarde ta voix ouvrir des fleurs dans la langue tu vas chercher un bonbon tu ris je te fais rire j'existe j'ai fait semblant de me prendre la porte j'ai fait semblant de me cogner je fais le con tu ris j'existe je me matérialise je sors des morts je sors de la mère morte je sors c'est douloureux j'ai peur j'ai peur tu sais tu le sais oui tu le sais je te l'ai dit dès le début j'ai peur de la rencontre amoureuse j'ai peur mais j'ouvre les bras quand même je te dis oui tu me dis oui tu t'énerves quand je me ferme quand je fuis tu pardonnes pas c'est ta beauté cette intransigeance c'est ta beauté cette cruauté la tienne tu lâches pas tu veux pas que je parte dans la mort dans l'utérus mort dans le viol de ma voix tu veux pas tu me harcèles tu souffres et je craque et je te dis ma mère me manque je pleure je l'enterre encore une fois je range les ossements dans la boîte où j'habite je sors tu m'accueilles tes yeux pétillent tu m'aimes je le vois bien tu m'aimes quand je t'offre ma brisure je t'aime c'est douloureux je t'aime je suis là au cimetière parmi les cyprès j'erre dans une histoire possible c'est la cause du rêve les paroles du vieux la photo je l'ai prise et ce que je vois c'est la lame tranchante d'un mur qui crie
je veux dire
ta voix -
je veux dire -
une histoire
c'est la trouée
qui rêve
tous ces mots qui textilent nos sentiments
dans la maison humaine
je veux dire -
ce cri
planifie l'étreinte
sur les dents cassés
des mots
crier
dans la mort
où puiser
les soifs
Voyage à Mazamet, Notes en vue d'un cri - 24, dimanche 29 septembre 2013
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