Notes en vue d'un cri
à Labruguière les arbres ont griffé mes joues avec les fleurs intenses inspirées les fleurs qui chantaient toutes chantaient dans le choeur des lumières et le printemps fou de ciel chantaient les fleurs chantaient la beauté ruisselante des photosynthèses et la misère noire du muscle à mon nom
le rêve a dit
tu es fils de l'amertume
de la tumeur faite mère
tu es la fibre malade
qui fait mourir les m_m_ns
j'ai hurlé hurlé hurlé
à peine sorti des forêts langées de vertes oraisons
j'ai agrippé les yeux sertis dans les brumes matinales
je les ai dévorés et depuis j'ai vu le corps totem
j'ai vu les nerfs ruisseler de gris sang j'ai vu la lymphe meurtrie torrentuer sous la potence et j'ai vu les os vibrer dans l'aurore interne les os debout sur le seuil je les ai vus résonner dans le trouble oh! ils chantaient les arias cancéreux l'hommage à la m_r_ ils chantaient oh! les os du corps chantaient les misères du souffrir et les peines affreuses vautrées dans la chimio ils chantaient oh! je les ai vus les ai écoutés les os du totem chanter la fonte des muscles et la perte du pouls chanter le faible murmure rugueux de la mort à fleur de peau chanter la rude tendresse des yeux fixés dans le mur nu oh! chanter ces yeux ouverts immenses ces yeux ciels marins fous déclinant des crépuscules odieux dans la peau jaune du visage ces yeux qui hurlaient tendrement
nous allons
mourir
et la bouche dessous se taisait disait
tu veux de l'eau?
et moi j'avançais mon verre et je buvais
l'eau du mourir
l'eau du baptème funèbre
l'eau hurlante et ses larges plaines tonitruantes
l'eau harassante et ses mémoires boueuses
l'eau tuméfiée qui emportait ma bouche jusqu'au fond du cul
Voyage à Mazamet, Notes en vue d'un cri, 10, mardi 21 mai 2013
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire